» Définitions
Avertissement : cette définition est tirée du volume Le nouveau Larousse illustré
ARCHITECTURE (lat. architectura; du gr. architektonein, bâtir) n. f. Art de construire des édifices, dans des proportions
et selon des règles déterminées : L'ARCHITECTURE n'inspire à l'esprit que des idées de grandeur, de noblesse, d'austérité
majestueuse. (E. Montégut.)
— Mode de construire, genre, caractère distinctif des ornements d'un édifice : II y a cinq ordres principaux d'ARCHITECTURE.
Monument d'une belle ARCHITECTURE.
— Se dit aussi d'un monument, d'un édifice ou d'une de ses parties : II faut avouer que plus une ARCHITECTURE, une
joaillerie, une arme, datent d'une époque reculée, plus le goût en est parfait et le travail exquis. (Th. Gaut.)
— Dans un sens tout à fait restreint, Moulures, ornements : Entrée décorée d'ARCHITECTURES. (B. de St-P.)
— Par compar. Structure : Les os sont, dans l’ARCHITECTURE du corps humain, ce que sont les pièces de bois dans un
bâtiment de charpente. (Boss.) \\ Arrangement harmonieux des parties de l'univers :
Je regarde en gros toute la nature,
J'en observe l'ordre et l'architecture.
REGNIER DESMARETS.
— Architecture polychrome. V. POLYCHROME.
— Franc-maçonn. Morceau d'architecture, Nom donné aux discours prononcés dans les loges maçonniques.
— ENCYCL. L’architecture est l'un des trois arts compris sous la dénomination d'arts du dessin, et celui dont les
manifestations impressionnent l'esprit avec le plus de puissance. Elle dispose de proportions auxquelles ne peuvent
prétendre ni la peinture ni l’art plastique. Mais de nombreuses entraves font obstacle à l’inspiration de l’architecte.
Il n'est pas libre de concevoir un monument avec la seule préoccupation du style et de la beauté. Tout monument doit être
utile ; les besoins matériels, les aspirations spirituelles, la sécurité de l'homme, dictent à l'architecte le plan
général, la distribution intérieure, l'étendue, la richesse ou la sévérité de l'édifice qui lui est demandé. De là les
trois grandes divisions sous lesquelles on peut grouper les monuments construits depuis l'antiquité la plus lointaine
jusqu'à nos jours : l'architecture religieuse, architecture civile, et l'architecture militaire. Certains écrivains se
sont plu à des classifications moins restreintes. C'est ainsi que l'architecture rurale hydraulique ou navale comprend,
soit les bâtiments d'exploitation réclamés par l'agriculture, soit les aqueducs, soit les vaisseaux. Mais nous estimons
ces dénominations arbitraires. En effet, la construction d'un navire, d'un pont ou d'un aqueduc, relève plus de l'ingénieur
que de l'architecte proprement dit, et, d'autre part, les habitations rurales se rattachent à l'architecture civile au
même titre que les constructions de tout ordre élevées à l'intérieur des cités.
L'Egypte et l'Asie ont été le double berceau de l'architecture. On s'accorde à penser que les Pyramides de Memphis sont
les monuments les plus anciens que nous connaissions. Le Sphinx de Gizeh, taillé dans le roc, et qui tient entre ses pattes
de géant un temple d'albâtre et de granit, ne peut être séparé des Pyramides. Les hypogées ou tombeaux souterrains, aux
supports rectangulaires, aux architraves rigides et sans ornements, trahissent l'époque éloignée de leur construction.
L'obélisque n'apparaît dans l'architecture égyptienne qu'avec la XIIe dynastie. Puis le support aux quatre faces se
rapproche de la forme ronde à mesure que l'architecture en adoucit les angles en lui donnant huit et seize pans. La
colonne est trouvée. Son chapiteau donne l'impression d'un bouton de lotus. D'autre part, le plan général du temple est
fixé. II aura la forme d'un parallélogramme. Ces règles, une fois posées, ne seront plus enfreintes. L'architecte égyptien
y ajoutera sans doute, à mesure que les siècles lui auront permis de bénéficier de la tradition. Toutefois, les détails,
qui rendent l'architecture des XIXe et XXe dynasties supérieure à celle des périodes plus anciennes, ne modifient pas le
caractère général des monuments de l'Egypte, uniformes à toute époque, portant le signe d'une rigoureuse servitude imposée
à l'artiste par les castes sacerdotales, mais également admirables par le fini de l'exécution, la science de l'appareillage,
la résistance des matières mises en œuvre. L'architecture à Babylone et à Ninive s'exerça d'abord dans la construction
de digues et de murs d'enceinte. Le temple de Baal, les jardins de Sëmiramis, ont joui d'une juste renommée, mais la
brique employée dans ces vastes travaux a mis obstacle à leur durée. En somme, nous connaissons mieux les détails que
l'ensemble des monuments assyriens. C'est par fragments que les fouilles nous mettent à même de restituer les édifices
anciens de l'Asie centrale. Mais l’archéologue de nos jours est en mesure de décrire le temple de Sargon ou tel monument
de Persépolis. L'art égyptien est dépassé par les Mèdes et les Perses. Si maintenant, nous pénétrons dans l’Asie
occidentale, nous constatons, chez les Phéniciens et les Juifs, la pratique d’un art dans lequel les métaux ouvrés
occupent une large place. Mais nous n’avons guère d’autre source de renseignement que les écrits des contemporains sur
ces monuments disparus. Les chapelles et les tombeaux d’Amrith ne se séparent pas du style égyptien. La Lydie, la Phrygie
renferment aussi des sépultures d’une antiquité qui les soustrait à l’influence grecque. Plus modernes sont les tombeaux
lyciens, aussi leur style n’est-il pas exempt de mélange. L’Inde ne doit pas être omise dans ce tableau sommaire de
l’architecture à travers les âges. Ses dagops ou tombeaux, ses cloîtres, ses pagodes, subsistent et font l’étonnement
des yeux ; mais la plupart de ces constructions sont d’époque relativement récente, et c’est moins par l’originalité
du plan, ou le caractère architectonique, que par la profusion du décor qu’ils séduisent le regard. Les dagops anciens
sont de forme circulaire, assis sur une terrasse et recouverts d’un dôme. Rien de remarquable dans ces monuments, à peine
antérieurs à la belle époque de l’art grec.
Athènes est le lieu de toute transformation au point de vue de l’architecture. Le siècle de Périclès et de Phidias est
un sommet. De longues pages seraient nécessaires pour faire l’exposé même rapide des évolutions, des développements
successifs, et enfin de l’impeccable harmonie des constructions de la Grèce.
Là, ce ne sont plus seulement les textes qui nous éclairent, les ruines ont leur éloquence. Telle fut l'influence
heureuse de l’art grec sur le génie des peuples de l'Occident, que nous lui avons décerné le titre d'art « classique ».
La clarté, la mesure et la grâce le distinguent. Il s'exerce de préférence sur les temples. A Athènes, à Ephèse, à
Eleusis, à Paestum, ce sont des temples qui renferment dans leurs «membres » mutilés l'ensemble des principes mis en
pratique par les architectes de la Grèce; ce sont des temples qui permettent d'apprécier la différence d'aspect du
dorique et de l'ionique, ternies nouveaux dont nous avons fait le qualificatif d'ordres très distincts, c'est-à-dire
d'un enchaînement de lois si sagement écrites qu'elles ne cessent pas d'être respectées. La « colonne » est le « membre »
le plus original, le plus souple, le plus orné dans l'architecture grecque. Les colonnes de l'Erechthéion demeurent un
exemple de proportions et d'ornement qui n'a pas été surpassé.
Les Etrusques érigeront aussi des temples, mais leur tempérament mercantile et utilitaire les condamne à être plus
constructeurs qu'architectes. Les tombeaux, les fortifications, les portes de ville, les souterrains qu’ils ont marqués
de leur savoir et de leur puissance, offrent à l'étude de curieux spécimens de « l'arc appareillé » chez les anciens.
Ils sont les premiers à concevoir la « voûte », et à l'exécuter dans des conditions si parfaites, que le temps n'a pas
ébranlé leurs œuvres.
A l'architecture étrusque, les Romains emprunteront la « voûte », dont ils sauront modifier la forme, depuis le
« berceau » jusqu'à la « coupole ». Aux Grecs, ils emprunteront la « colonne», et, sans se préoccuper des lois
sagement posées par leurs devanciers, ils abuseront des colonnades, comme ornement d'édifices de caractères très
divers. Le chapiteau dorique ou ionique ne suffira point à leur besoin de luxe. Ils l'estimeront trop sobre, trop nu.
Le chapiteau corinthien, déjà surchargé, n'obtiendra pas grâce à leurs yeux. On les verra surenchérir dans la parure
abondante du sommet de leurs colonnes, et les historiens de l'architecture appelleront « composite » le chapiteau romain,
lourd assemblage des détails que comportent les styles ionique et corinthien. Rome n'a pas créé son architecture, elle
s'est bornée à tirer parti, sans y ajouter, de l'architecture d'Athènes. Mais ce qui appartient en propre aux Romains,
ce sont les monuments qu'ils ont élevés dans l'immense empire dont la fortune des armes les avait faits maîtres. Routes,
aqueducs, murs d'enceinte, thermes ou théâtres, ce que les architectes de Rome ont laissé derrière eux atteste leur sens
pratique, leur énergie, la fertilité de leur esprit, leur entente de ce qui impose à la pensée par des dimensions
grandioses. Le Colysée, les thermes de Caracalla et de Dioclétien, etc., justifient le haut renom des édifices construits
par les Romains.
De Tibère à Constantin, une révolution morale s'accomplit. La religion chrétienne supplante le paganisme, mais durant
plusieurs siècles le nouveau culte se confine dans les catacombes; quand les chrétiens paraissent au grand jour, c'est
dans l'arène que des juges implacables les condamnent à verser leur sang. L'ère des persécutions ne pouvait être propice
aux manifestations de l'art. Mais lorsque Constantin eut reconnu la religion du Christ comme religion d'Etat, les chrétiens
sortirent des entrailles du sol, et songèrent à bâtir des temples. Encore que l'opinion contraire ait eu ses adeptes, nous
pensons que les premiers architectes chrétiens se servirent des basiliques païennes, adaptées, sans doute, sans
modifications notables, aux besoins du culte nouveau. Saint-Pierre, qui disparaîtra au XVe siècle pour faire place au
monument actuel, Saint-Paul-Hors-les-Murs, détruit en ce siècle par le feu, Sainte-Marie-Majeure, sont les plus anciennes
basiliques chrétiennes. On se plaît à voir dans leur construction le type des basiliques du paganisme. Saint-Apollinaire
de Ravenne, élevée au vie siècle, marque un progrès. L'architecte fait preuve d'originalité. Désormais la façade des
temples sera l'objet d'une décoration extérieure ; des tours ou clochers s'ajouteront à l'édifice, dont la division
intérieure n'est plus la même que dans les basiliques romaines. Mais Byzance impose son joug militaire à Ravenne, et
à peine Saint-Apollinaire est-elle achevée, que l'architecte de cette église, chargé de construire Saint-Vital, cède,
dans le tracé du plan de cet édifice, et plus encore dans le détail intérieur, à l'influence byzantine.
Un double principe, la croix grecque et la coupole, caractérise les monuments byzantins. Sans doute, la coupole n'est
déjà plus une nouveauté, mais les Romains l’ont conçue dans des proportions restreintes: ils en ont fait le toit de
chapelles ou de sanctuaires modestes; les orientaux y mettront toute hardiesse, et leurs dômes témoigneront d'une technique
qui ne connaît pas d’entraves ou de surprises. Mais ce qui distingue l’architecture byzantine, c’est au premier chez
l’opulence du décor, dans lequel entrent les marbres rares, les métaux, les mosaïques. Sainte-Sophie, à Constantinople,
si l'on fait abstraction des minarets dont les musulmans l'ont flanquée lorsqu’ils en firent une mosquée, est la basilique
byzantine la plus remarquable du VIe siècle.